mercredi 5 mars 2014

Impossible de grandir / Fatou Diome

Salie, originaire de la petite ville de Niodor au Sénégal, vit aujourd’hui  à Strasbourg. Lorsque son amie Marie-Odile l’invite à fêter un anniversaire chez elle en famille, Salie panique. En effet, « papa, maman, la famille », elle ne connaît pas. Elle est une enfant « illégitime » et toute son enfance, elle a été rejetée, brimée et maltraitée par une famille qui ne l’acceptait pas. Seuls ses grands-parents l’ont recueillie, aimée et choyée, et l’ont aidée à devenir la femme indépendante et écrivain qu’elle l’est aujourd’hui. Mais, l’approche du dîner en famille la tétanise et ses vieux démons, ses souvenirs reviennent la hanter, en la personne de « la Petite », avec qui elle engage un long combat. 

Avec ce roman, Fatou Diome évoque des thèmes forts : le rôle des femmes dans les traditions ancestrales du Sénégal, la nouvelle religion qui vient marcher sur les plates-bandes des anciennes religions, l’intolérance, la violence faite aux enfants, l’intégration, la question des enfants nés hors mariage…  À travers les souvenirs de son personnage, c’est tout un pan de la société sénégalaise que nous explorons. Ce sont d’ailleurs les épisodes de l’enfance de Salie que j’ai le plus appréciés dans ce roman : la plume de Fatou Diome est belle, poétique et elle parvient parfaitement à rendre compte des émotions, des sentiments d’un enfant. Le message délivré par le roman est puissant : s’accepter soi-même, accepter son passé et grandir. 

Grandir, devenir adulte, considéra la Petite, c'est ne plus courir à la recherche d'un bosquet où se tapir. Devenir adulte, c'est, au lieu de s'enfuir en permanence, oser se retourner et, enfin, faire face au loup.
J'étais absolument d'accord avec elle et j'allais enfin tout affronter, les loups, mais aussi cette naissance qu'on me reproche, alors que je n'y suis pour rien. Allons-y !

Malheureusement, Fatou Diome entrecoupe son texte de longs passages proches d’une psychanalyse, ou à teneur philosophique, qui m’ont quelque fois fait perdre le fil de la narration. Les 400 pages se concentrent sur quasiment une seule journée, dans laquelle Salie engage un dialogue avec « la Petite », entre dispute et réconciliation. C’est un roman très introspectif et l’auteur semble parfois oublier son lecteur. Ce roman m’a semblé souffrir de quelques longueurs, et aurait mérité d’être allégé. Malgré tout, ce roman est une belle découverte de la plume de Fatou Diome et m’a donné envie de lire son premier roman, Le ventre de l’Atlantique.

Lu dans le cadre du Prix Océans.

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