mercredi 25 mai 2011

Mes parents d'Hervé Guibert

Dans le cadre du challenge "Année de naissance" organisé par Sabbio, j'ai lu Mes parents d'Hervé Guibert, paru en 1986. 

Hervé Guibert est né le 14 décembre 1955 à Saint-Cloud. Il est connu pour ses récits mêlés de fiction et d'autobiographie et a publié son premier livre, La Mort propagande en 1977. Il a également publié de nombreux articles sur la photographie, mais aussi la vie culturelle et française des années 1980 (critiques de cinéma, festival de Cannes, théâtre, musique, opéra...). Ces articles ont été réunis dans deux recueils : La photo, inéluctablement (photographie) et Articles intrépides (vie culturelle), tous deux parus aux éditions Gallimard dans la collection "Blanche". Hervé Guibert est aussi photographe (plusieurs recueils de ses photographies ont été publiés) et scénariste (il reçoit en 1984 le César du meilleur scénario original pour L'homme blessé).
Homosexuel, on retrouve dans ses écrits la présence des hommes qui ont marqué sa vie, mais également de sa famille, notamment ses parents et ses grand-tantes, Suzanne et Louise. En 1988, Guibert apprend qu'il est atteint du sida et meurt à 36 ans, 14 jours après une tentative de suicide, le 27 décembre 1997. 

Mes parents débute, en 1983, avec la grand-tante Louise, qui, se sentant mourir, se met à faire le ménage dans ses papiers et à brûler les plus compromettants. Guibert interroge alors ses deux grand-tantes et apprend que sa mère aurait commis une infamie. C'est ainsi que le secret du mariage des parents de Guibert est dévoilé. A partir de là, il enchaîne chronologiquement le récit de souvenirs marquants, de sa naissance à la maladie de sa mère, des années plus tard. On a donc une suite de paragraphes plus ou moins longs, parfois très courts dans lesquels il évoque ses premières amours, les vacances familiales, les dîners etc..,  soit des scènes de famille, souvent teintées d'érotisme.

Mes parents est un récit éclaté, dans lequel Hervé Guibert reprend, réinvente ou reconstruit  ses souvenirs d'enfance. Environ un tiers du livre est constitué de pans entiers de son journal qu'il reproduit : "A partir de 1979, mes parents occupent à peu près un cinquième de mon journal. Je vais recopier ici les passages  qui les concernent, rajoutant entre eux les épisodes qui sur le moment m'ont fait défaut." (p.120). La relation qu'il entretient avec ses parents est compliquée, mêlée de haine et d'amour, presque malsaine. Guibert laisse libre court à ses fantasmes : son père se superpose souvent à l'image de ses amants, et Guibert se surprend à souhaiter la mort de sa mère.

J'aime l'écriture de Guibert, franche et directe, que j'avais découvert avec L'Image fantôme (éditions de Minuit). J'avais ensuite enchaîné avec Suzanne et Louise, un recueil de photographies et de fac-similés de textes manuscrits consacrés à ses grand-tantes. Dans Mes parents, j'ai particulièrement aimé le récit de ses premières amours, ses souvenirs d'école (les billes et le papier crépon) et l'évocation de la relation torturée qu'il a avec ses parents. J'ai  moins aimé les descriptions crues d'actes sexuels et la morbidité quasi omniprésente dans Mes parents. Je lirai volontiers, mais plus tard, car ce livre m'a marqué, d'autres livres d'Hervé Guibert.


Extraits : 

Elle [Louise] me demande : "Tu aimes ta mère ?" Bien sûr je ne réponds pas. "Alors tu ne dois pas savoir, dit-elle, ta pauvre mère est si malade, je ne peux pas lui faire ça." Je lui dis que l'imagination est toujours plus horrible que la vérité. "Alors imagine que ta mère est un démon, un vampire, un succube", me dit-elle. (p.13) 

Elle [Suzanne] me dit : "Alors c'est toi qui écriras ce livre sur l'infamie que je n'ai pas pu écrire." (p.13) 

L'été 76 je passe un été terrible avec mes parents à Porquerolles : je suis atrocement amoureux de T. que j'ai connu six mois plus tôt et qui, après trois mois de relations ardentes, a décidé affectueusement mais fermement de les interrompre. Il m'écrit de temps en temps et les lettres que moi je lui écris deviennent si nombreuses et si torturées que je n'ai plus qu'à les faire passer sur un cahier. [...] Le cahier aux lettres d'amour est devenu un livre édité par Régine Deforges : La Mort propagande. (p.108-109)

Mes rapports avec mes parents se sont réduits à des formules d'attentions, de craintes, d'inquiétudes réciproques. Je suis d'une froideur extrême avec eux, ils n'osent même plus me poser de questions. Mais je pense : les laisser juste me voir, et toujours vivant, est le plus grand don - le seul - que je puisse leur faire. (p.120)

 
Les extraits sont issus de Mes parents d'Hervé Guibert chez Folio.


Pour plus d'informations sur Hervé Guibert et sur son œuvre littéraire et photographique, visitez le site http://www.herveguibert.net/

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